Onze novembre 2019, cérémonie commémorative de l’armistice de la grande guerre devant le monument aux Morts de Sépeaux : lecture des noms des soldats suivis de la déclamation « Mort pour la France ». Dans ce moment solennel, un nom résonne pour la première fois : « Lucien Broddes, mort pour la France » et l’assemblée réunie pour l’occasion découvre le nom de cet enfant du pays gravé à tout jamais dans la pierre du monument aux Morts de Sépeaux.
Pourquoi avoir gravé le nom de ce soldat mort pour la France sur le monument aux Morts de Sépeaux ?
En 2018, à l’occasion du centenaire de l’armistice de la guerre 14-18, l’association Patrimoine & Partage a effectué des recherches pour préparer l’exposition « Sépeaux-Saint-Romain rend hommage à ses soldats ». Ces travaux ont permis de retrouver des informations sur les enfants de Sépeaux et de Saint-Romain morts pour la France et de suivre leur parcours militaire. Parmi ces 48 soldats tombés lors de la grande guerre, le soldat Lucien Camille Broddes, né à Sépeaux le 11 décembre 1892, n’était inscrit sur aucun monument aux morts de France.
Que dit la loi n° 2012-273 du 28 février 2012 ?
Lorsque la mention « Mort pour la France » a été portée sur son acte de décès dans les conditions prévues à l’article L. 488 du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de la guerre, l’inscription du nom du défunt sur le monument aux morts de sa commune de naissance ou de dernière domiciliation ou sur une stèle placée dans l’environnement immédiat de ce monument est obligatoire.
La transcription de l’acte de décès de Lucien Camille Broddes du 2 mars 1922 suite au jugement rendu par le tribunal civil de la Seine en date du 9 mars 1921 dans les registres du premier arrondissement de Paris précise les faits suivants : Le tribunal dit et déclare que le neuf mars mil neuf cent seize est décédé des suites de ses blessures « Mort pour la France » à Douaumont (Meuse), Broddes Lucien Camille, soldat au 21e bataillon de chasseurs à pieds, né à Sépeaux (Yonne) le onze décembre mil huit cent quatre vingt douze, fils de Désiré François Broddes et de Marie Virginie Debise, célibataire, dernier domicile inconnu.
Cette mention de « dernier domicile inconnu » explique probablement le fait que Lucien Broddes ne soit inscrit sur aucun monument aux morts.
Mais qui est Lucien Camille Broddes ?
Lucien Camille Broddes est le fils de Désiré François né le 12 janvier 1864 à Fontenouilles et de Maria Virginie Debise née à Paris Xe le 15 février 1867. De leur union le 16 mars 1889 à Prunoy naissent 9 enfants dont 6 filles. Son grand-père Louis Brode [sic] (1834-1911) est belge de parents inconnus, il décède ainsi que son épouse Rose Maret (1840-1903) à la Ferté-Loupière.
La famille Broddes après avoir vécu à Prunoy, réside à Sépeaux et poursuit son périple en passant par Villefranche, Bussy-en-Othe, Fresnes (21), Jully et à Quemigny-sur-Seine dans le département de Cote d’Or au hameau de Cosne. C’est là qu’en 1911, Lucien Camille vit avec ses parents, ses trois sœurs et son frère. Il y exerce la profession de tuilier avec son père et son frère Paul Albert dans l’atelier de fabrique de tuiles chez Caiset-Lecourt. En 1913, il habite Arthonnay et exerce toujours la profession de tuilier avant d’être incorporé le 1er octobre 1913 au 21e bataillon de chasseurs à pied. Mobilisé le 2 aout 1914, il est blessé au bras droit par éclat d’obus le lundi 17 mai 1915. Il fait campagne contre l’Allemagne du 2 aout 1914 au 8 mars 1916. Lucien Camille Broddes, matricule 940, est déclaré décédé le jeudi 9 mars 1916 à Douaumont (55). Ce même jour, le journal des marches et opérations des corps de troupe recense 29 tués, 40 blessés et 486 disparus dont 446 chasseurs.
Les deux frères de Lucien Camille Broddes, Désiré Victor (1888-1959) matricule 565 et Paul Albert (1895-1979) matricule 1264, sont également mobilisés ; blessés à plusieurs reprises, ils sont tous deux cités pour leur bravoure et sont décorés de la médaille militaire.
Merci au Conseil Municipal de Sépeaux-Saint-Romain d’avoir accepté et concrétisé le projet d’inscription sur le monument aux morts de Sépeaux du soldat Lucien Camille Broddes, tombé à l’âge de 23 ans, qui recevra désormais l’hommage qu’il mérite en faisant partie de la trop longue liste des soldats « morts pour la France ».
Dominique et Jean-Louis Mutti